Europe : Le problème de l’immigration est-il vraiment un problème ?

À deux mois des élections présidentielles en France, la question de l’immigration reste centrale pour la plupart des candidats. L’immigration, mais aussi l’Islam sont montrés par beaucoup comme étant une menace pour l’intégrité de la société européenne ; le point sur la question.

Un clash de civilisations peu probable.

Les débats télévisés et les documentaires repris sur les médias sociaux se succèdent sur le sujet. Il semble même qu’on ne parle que de ça : Roubaix antre islamiste (voir notre article Peur salafiste en Europe) où l’angoisse règne pour ceux qui n’acceptent pas une vision sectaire de l’Islam, ou alors dispute sur les plateaux entre candidats à la présidentielle quant au nombre d’étrangers et de Musulmans dans les prisons, ou du coût de la sécurité sociale pour les illégaux. Pendant ce temps, une théorie, appelée par certains complotiste, celle du grand remplacement, devient populaire dans les milieux d’extrême droite.

Mais dans ce déluge de chiffres, et de débats plus ou moins houleux, que peut-on retenir au sujet de l’immigration et de l’Islam en Europe et en particulier en France ? Toutes les études indépendantes, par exemple celles d’Hervé Le Bras, sociologue et démographe, montrent qu’il y aurait une augmentation progressive, mais de seulement 150 000 immigrés de plus en France par an, ce qui est peu et très loin des chiffres genre fake news de 40 millions de migrants qui seraient entrés dans l’Union européenne en 2021 d’après la candidate Valérie Pécresse. D’autre part, le Pew Research Center estimait en 2017 le nombre de musulmans en France à 8% de la population. Suivant un scénario peu probable de forte immigration, ce nombre pourrait doubler avant 2050 (le nombre de Musulmans en France passant à 18% de la population).

Dans ces conditions, il faudrait un siècle pour que la cathédrale Notre-Dame se transforme en mosquée comme dans le roman d’Eléna Tchoudinova, ou que l’université de la Sorbonne d’un autre roman, Soumission de Michel Houellebeck, tombe entre les mains des islamistes ; nous sommes loin ici d’un grand remplacement.

Importance économique de l’immigration.

Laissant de côté une improbable menace d’invasion migratoire a tendance musulmane, quels sont les autres enjeux liés à l’immigration ?

À savoir qu’il y aurait près d’un million de Tunisiens en France (730 000 officiellement en 2016 auquel il faudrait ajouter ceux qui ne sont pas immatriculés aux consulats et en particulier les illégaux). C’est que plus d’un Tunisien sur dix vit à l’étranger, beaucoup installés dans leur pays d’accueil depuis de longues années. La plupart gagnent bien leur vie et investissent dans l’immobilier ou dans de petits commerces de leur région natale ; certains affirment que ce type de financement venant des Tunisiens résidents à l’étranger (TRE) représenterait jusqu’à 20% du PIB de la Tunisie (comparativement le tourisme en moyenne représente 14 % du PIB).

Ces millions d’Euros venus d’Europe qui font grimper les prix de l’immobilier à Tunis, mais permettent de faire vivre des familles entières restées sur place, beaucoup s’y intéressent. La douane tunisienne fait de gros efforts afin d’endiguer le flot de devises entrant en Tunisie illégalement. En France, le candidat de droite aux élections Éric Zemmour voudrait bien taxer toutes les transactions monétaires se faisant entre la France et l’étranger même celles passant par l’intermédiaire de compagnies telles Western Union. L’argent de l’immigration est une manne providentielle pour les gouvernements des deux côtés de la Méditerranée et qui risque de ne pas rester longtemps intouchée. Si c’est le cas, il est fort probable que l’on observe un déclin massif de l’immigration en direction de l’Europe, car il ne faut pas se voiler la face, la vaste majorité des immigrants ne se rendent pas en Europe pour amour de la culture ou de la liberté de penser, mais pour des raisons économiques.